Sur le seuil de l'une d'elles se tenait la Reine.Sa robe,
ses mains, son visage étaient souillés de sang et cependant elle semblait impassible, sûre
d'elle-même. A tous ceux qui écoutaient, elle dit ce qui s'était passé :
"Ici, gît le corps de
mon époux, justement frappé par ma main."
C'était son sang qui rougissait sa robe et son
visage, et elle était heureuse.
"Il tomba et comme il agonisait,
son sang
Jaillit et m'éclaboussa d'une écume
sombre, une rosée
De mort, qui m'était aussi douce
que la douce pluie du ciel
Au blé qui germe."
Elle ne voyait aucune raison d'expliquer son acte ni
de l'excuser. A ses yeux, elle n'était pas une meurtrière mais une justicière.
Elle avait puni le meurtrier de son propre
enfant,
"Qui tua sa fille, la tua pour
un sortilège
Contre les vents de Thrace."
Son amant l'avait suivie, il se tenait auprès
d'elle : Égisthe, le plus jeune des fils de Thyeste, né après l'affreux festin.
Il ne nourrissait aucun grief contre Agamemnon,
mais Atrée, qui avait égorgé les enfants pour les servir à leur père, Atrée
était mort et la vengeance ne pouvait plus l'atteindre. Son fils devait donc payer pour lui.
Tous deux, la Reine et son amant, avaient de bonnes
raisons de savoir que le crime ne met pas fin au crime. Le cadavre de l'Homme qu'ils venaient de tuer en fournissait
la preuve.
Mais, dans leur triomphe, ils ne s'arrêtaient
pas à penser que cette mort, comme toutes les autres, n'amènerait que des malheurs.
"Plus de sang, ni pour toi,
ni pour Moi"
dit Clytemnestre à Égisthe
"Nous sommes maîtres ici, à
présent, et ensemble nous ferons régner l'ordre."
Iphigénie avait eu un frère et une soeur,
Oreste et Électre.
Oreste eut il été dans la maison qu'
Égisthe l'aurait certainement tué ; mais le jeune garçon était en sécurité
chez un ami.
Quant à la jeune fille, Égisthe
dédaigna de lui ôter la vie ; il se contenta de la rendre aussi malheureuse que possible jusqu'à
ce qu'enfin, poussée à bout, toute sa vie se concentrât sur un seul espoir : Voir revenir Oreste
en vengeur de leur père.